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04 novembre 2022

François Blondel (ECL 1979) entre science et art
Créateur d’entreprises, professeur à l’École Centrale de Lyon, auteur, éditeur d’ebooks et livres beaux-arts

Sorti de l’École en 1979, François Blondel crée sa première entreprise avec deux associés en 1980. À l’époque, l’informatique de gestion est encore balbutiante dans les PME et ils sont parmi les tout-premiers à développer un logiciel de GPAO (Gestion de Production Assistée par Ordinateur) pour les PMI, ce qui deviendra dans les années 1990 un ERP. En 2011 les associés décideront de vendre le groupe Kardol et François Blondel embrasse alors une autre carrière…


Une première vie dans l’informatique pour les entreprises industrielles

En 1979-80, nous étions des Ovnis dans le paysage professionnel. Le terme de start-up n’existait pas encore, c’est pourtant ce que nous avons créé. Il existait une différence de taille avec le modèle actuel : nous n’avons jamais effectué de « levée de fonds » mais patiemment cherché (et trouvé) des clients, tout en développant nos propres logiciels. Le chemin a été un peu plus long et difficile mais il était sans doute plus robuste. Nous avons ainsi mis en place l’informatique de centaines de sociétés industrielles sur des sites de 50 à 3000 personnes, surtout dans l’automobile, la plasturgie, la chimie, la cosmétique et la pharmacie.

Dans le même temps, j’ai eu à cœur de transmettre ce nouveau métier que j’avais contribué à définir. Alors, dès 1982, j’ai créé à l’École Centrale de Lyon le cours de « Management de la Production » (pour les 3A) . D’abord vacataire, je suis devenu professeur associé dans les années 90, puis j’ai essaimé en créant de nouveaux cours et la filière métier « consultant ».

J’ai aussi mis mes idées au clair en écrivant plusieurs livres de gestion chez Dunod (toujours dans la bibliographie des cours de Centrale Lyon en 2022).

Durant toutes ces années, j’ai croisé des centaines d’étudiants (certains particulièrement brillants, rien d’étonnant !), contribué à créer (à ce qu’ils m’ont dit) des vocations, et je suis toujours en contact avec des dizaines d’entre eux sur les réseaux sociaux.

Au début des années 2010, la lassitude commençait à se faire sentir, après plus de 30 ans dans le métier et le même environnement. La société était prospère mais le marché est devenu trop mature pour mes envies. Alors que c’était d’abord une aventure passionnante dans les années 80, les process étaient devenus très (trop) codifiés pour mon goût, le quotidien était devenu un travail et le plaisir n’était plus suffisamment présent. Alors j’ai accompagné pendant deux ans la nouvelle équipe dirigeante puis j’ai tourné la page.

Histoire de l’art et édition : un credo, le livre illustré

Mon moteur a d’abord été et est toujours la curiosité, mon envie celle de transmettre. La curiosité m’a emmené sur les traces des grands artistes. Alors peu à peu je suis passé d’amateur à historien de l’art, curieux de comprendre les artistes et leur œuvre.

Rat de bibliothèques et de musées, j’étais frustré par les ouvrages existants. Certains citaient les œuvres sans même les montrer, sans les situer dans l’histoire de l’artiste, une méthode décourageante pour le néophyte ou l’amateur et qui cantonne trop souvent l’art dans un ghetto de spécialistes. D’autres livres utilisent les illustrations comme faire-valoir sans permettre au lecteur une approche globale. Que signifient 24 ou 48 reproductions dans un livre quand un peintre a créé plus de 1000 tableaux ? Enfin les quelques beaux-livres subsistants, sérieux dans leurs textes et leurs illustrations n’existent que s’ils sont subventionnés pour une exposition « blockbuster » et sont proposés à des prix dissuasifs.

Afin de transmettre mes passions, j’ai défini et mis au point avec un ami prof de l’École Centrale de Lyon (Daniel Muller) un logiciel (on ne se refait pas !) permettant de créer facilement un livre en insérant des images issues d’une base de données. Celle-ci contient aujourd’hui près de 35 000 œuvres.

VisiMuZ est ainsi née pour créer des ouvrages beaux-arts avec beaucoup plus d’illustrations que les ouvrages actuels. La plupart sont des ebooks (les reproductions sont ainsi agrandissables, la démarche est plus éco-responsable, et leur prix modique les rend accessibles à tous), quelques-uns sont à la fois en ebooks et en version papier (beaux-livres). Leur point commun est de compter systématiquement plusieurs centaines de reproductions en couleur, et de replacer les tableaux dans un contexte global. J’ai ainsi publié près de 60 ouvrages (monographies, guides de musées), et écrit à propos de quelques artistes (Gustav Klimt, Amedeo Modigliani, Albert Marquet) dont je me sentais proche.

La construction de VisiMuZ a aussi pu se faire parce que j’avais beaucoup moins de contraintes financières. L’activité est devenue viable, mais n’aurait pu me faire vivre dix ou quinze ans auparavant.

Quelques faits marquants

  • Notre catalogue raisonné des peintures de Georges Seurat est maintenant cité régulièrement lors des ventes aux enchères.
  • Notre « Histoire du nu féminin dans la peinture européenne» est illustrée de plus de 1350 tableaux et dessins.
  • Les trois tomes de notre guide du musée du Louvre comprennent plus de 1070 photos de tableaux.
  • VisiMuZ a publié un grand classique de Bernard Berenson (Les Peintres italiens de la Renaissance) avec pour la première fois les reproductions des tableaux en couleurs.
  • Travailler avec une base de données m’a permis des rapprochements inédits et je suis impliqué dans la recherche des tableaux spoliés durant la Seconde Guerre mondiale et non restitués.
  • Publication en janvier 2022 d’une monographie importante sur le peintre Albert Marquet, un beau-livre relié publié grâce au soutien du musée d’art moderne de Paris, du musée d’art moderne de Troyes, du musée de l’Annonciade à Saint-Tropez, de la galerie de la Présidence à Paris.

Centralien et historien de l’art. Un rapport ?

L’histoire de l’art nous confronte de façon permanente à une démarche scientifique, et le fait d’être ingénieur m’a beaucoup aidé. Aller aux sources, manipuler de grands ensembles d’informations (de données !) sont des préoccupations quotidiennes et ce n’est pas un hasard si nos camarades de Paris ou les Gadz’Arts ont le mot « art » dans le libellé de leur école. Je connais d’ailleurs plusieurs Centraliens dans le milieu. Comme je ne leur ai pas demandé l’autorisation de les citer, je vais parler simplement d’un « Centralien, conservateur et directeur de musée », d’un autre « PDG d’une grande maison d’édition », d’un troisième qui a créé un site connu pour les ventes aux enchères et, fraîchement retraité, s’adonne à sa passion du dessin.

Un message aux jeunes générations ?

Tout en ayant conscience de VOS contraintes, soyez à l’écoute de VOS valeurs et de VOS envies !  Pour cela, passez du temps en lectures et réflexion ! « Ce qui vaut la peine d’être fait vaut la peine d’être bien fait » [devise de Nicolas Poussin]

La cohérence va être alors le maître mot pour orienter vos actions, sans oublier aussi la chance qui vous sourira plus ou moins.

Vous ne ferez pas les mêmes choix selon que vous serez seul ou en charge d’une famille, ou d’une entreprise, et sans doute aussi des choix très différents en fonction de votre âge.  Ainsi même si j’ai rêvé pendant un temps de m’établir à l’étranger, être en charge d’une entreprise, de ses clients et de ses salariés me l’interdisait et je n’ai donc rien regretté.

Comme beaucoup j’ai entendu l’ « appel à déserter » des jeunes diplômés de l’AgroParis-Tech. Tout en comprenant leur démarche, je serais moins « rageux » (un effet de l’âge, sans doute !).

Mon message serait plutôt :  « Dans la mesure du possible (les fameuses contraintes), faites-vous plaisir dans votre vie professionnelle  en étant  cohérent avec vos valeurs et vos envies. » Si celles-ci vous amènent à « déserter », pourquoi pas ? Vous n’êtes liés ni à un métier, ni à une société. Les études d’ingénieur permettent une très grande variété de jobs. Profitez-en ! Et pour certains il va s’agir de « 100 challenges à travers le monde » (Merci, Ulysse  Lubin !), pour d’autres d’être coureurs cyclistes (clin d’œil à Jeremy Cabot, ECL 2014), d’autres encore de s’engager dans de grandes entreprises publiques,  privées, ou des actions humanitaires. Restez libres ! Préparez-vous aussi à plusieurs carrières différentes ! Dans la vie professionnelle aussi, « Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ! »  [Musset]

Et demain ?

Nous préparons chez VisiMuZ un catalogue raisonné des peintures d’Henri Matisse, un travail qui n’a encore jamais été réalisé et qui verra le jour en 2025. Matisse, comme Marquet sur lequel nous avons écrit, est aussi un peintre du bonheur, qui notait dans Jazz (1947) :

« Tirer le bonheur de soi-même, d’une bonne journée de travail, de l'éclaircie qu’elle a pu apporter dans le brouillard qui nous entoure. » 

 

Pour en savoir plus sur nos activités et nos parutions :

https://www.visimuz.com

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