Lichen : la dépollution modulaire au secours de la planète
Lichen a développé la première box née de son concept de dépollution modulaire : la box DCO. Issue de la réaction brevetée "Galvano-Fenton", elle est capable de détruire la pollution organique plus rapidement que toutes les autres solutions connues à ce jour . Rencontre avec Terence Burcelin (ECL 2015) qui nous parle de ce projet d'avenir.
Technica : Bonjour Terence. Peux-tu nous raconter comment est né le projet Lichen ?
Le docteur Naoufel Haddour, maître de conférence à l'Ecole Centrale Lyon a inventé en 2015, une nouvelle réaction pour détruire la micropollution : la réaction de Galvano-Fenton. La satt Pulsalys a financé 100.000€ pour faire maturer la technologie et poser un brevet. Pour des raisons internes à la satt, le brevet est ensuite retourné à l'Ecole qui en est alors devenue propriétaire. Il tombe dans les oubliettes jusqu'en 2018. Cette même année, Grégory Bataillou, promotion entrante 2013, quitte son poste en CDI dans une société d'informatique car il ne trouve pas de sens à ce qu'il fait. Il rencontre alors Sébastien Cecillon - Ingénieur Bioingénierie et Environnement au Laboratoire Ampère à Centrale Lyon, qui connaissait très bien l'histoire du brevet sur la Galvano-Fenton. Sébastien propose alors à Grégory de créer une société qui valorisera le brevet. L'histoire démarre ici.
Un samedi après midi de septembre, je rencontre Grégory autour d'un verre. Il me présente le projet et me dit qu'il cherche un entrepreneur pour l'aider à le développer. Je suivais justement le cursus Entreprendre et Innover de l'Ecole. Et après un tour du monde de neuf mois, j'étais rentré en France avec la ferme intention de lancer mon entreprise pour préserver la planète de la pollution. J'ai donc rejoint l'équipe. Le projet est alors passé de la valorisation d'un brevet, à la création d'une société pour dépolluer le monde. De cette rencontre est né Lichen.
Pourquoi ce nom de "Lichen"?
Le lichen est une symbiose entre un champignon et une algue. On a donc pris ce nom car notre vision est de faire une symbiose entre un modèle économique et un modèle écologique. Nous voulons proposer des solutions qui permettent au monde de continuer à se développer, à produire, à consommer tout en protégeant notre planète. En somme : "gagner de l'argent en protégeant l'environnement".
Quelles sont les problématiques auxquelles vous vous attaquez?
Nous voulons dépolluer le monde. Nous allons développer des solutions pour détruire chaque type de pollution. Ensuite, nous placerons ces solutions directement dans les zones polluantes pour la neutraliser à la source.
Aujourd'hui nous développons notre premier réacteur pour détruire la micropollution dans l'eau. La micropollution est une pollution qui est de l'ordre du microgramme par litre voire inférieure et qui même à cette très faible concentration est nocive pour l'homme et son environnement.
Le problème majeur de cette pollution est la bioaccumulation. Une fois absorbés, les micropolluants se fixent dans nos tissus et n'en partent plus. Toute notre vie nous stockons donc de plus en plus de micropolluants. Pire, ils se transmettent à nos enfants. Aussi le capital de micropollution dans notre corps augmente t-il en permanence tant que nous ne traitons pas cette pollution. A partir d'une certaine dose, elle provoque des cancers et des dérèglements hormonaux. Parmi les micropolluants, on trouve les perturbateurs endocriniens, les HAP, les pesticides (dont le glyphosate).
Et quelles sont les solutions nouvelles que vous proposez ?
Pour résoudre ces problèmes de pollution nous nous basons sur 2 principes : l'innovation et la modularité.
L'innovation
Les laboratoires du monde entier sont pleins de brevets inutilisés car les chercheurs aiment trouver des inventions mais ne savent pas comment les transformer en innovation. Nous cherchons en permanence les réactions les plus efficaces pour détruire la pollution. Nous avons déjà trouvé notre première réaction : la Galvano-Fenton. Après des tests en laboratoire, nous avons montré qu'il s'agit de la réaction la plus efficace sur le marché pour détruire les micropolluants organiques.
D'autres brevets seront utilisés par la suite pour les autres types de pollution (métaux lourds, agents pathogènes, etc...)
La modularité.
Aujourd'hui, les méthodes de traitement consistent à construire des stations d'épuration (STEP) en dur. Le problème des STEP est qu'elles ne sont pas adaptables. Une fois construites en béton on ne peut plus changer le débit traité ou ajouter de nouvelles technologies pour améliorer le traitement. Donc on se retrouve encore aujourd'hui avec des eaux qui contiennent encore des micropolluants ou des métaux lourds en sortie des STEP et qui finissent soit dans les océans soit dans notre robinet.
Le concept de la modularité est de transformer la chaîne de traitement classique en une somme de sous modules élémentaires et indépendants les uns des autres : les Box. Chaque box est standardisée pour traiter un type de pollution (micropolluants, métaux lourds, etc) avec un certain débit (1m3/h, 10m3/h, 100m3/h, etc). Ensuite il suffit de réaliser un assemblage de box pour traiter n'importe quelle source de pollution. C'est le principe du jeu Lego. Avec des cubes élémentaires Lichen pourra tout dépolluer comme l'expliquent ces illustrations du concept de modularité publiées sur notre site.
Y a t-il des cas où la dépollution modulaire atteint ses limites ?
La principale difficulté de la dépollution modulaire est de créer chaque box. Les box doivent être indépendantes les unes des autres et autonomes. C'est le point le plus délicat. Par exemple pour notre première box (la Box DCO) qui détruit la pollution organique, nous avons besoin d'ajouter régulièrement de l'eau oxygénée. Aussi aujourd'hui la box n'est pas autonome. Mais nous travaillons déjà sur une nouvelle version qui créera in situ l'eau oxygénée.
En bref, la limite principale de la dépollution modulaire est le temps de recherche et de développement de chaque box. Une fois les box créées, il n'y a plus de limite.
Qui sont vos clients et partenaires, et quel rôle Centrale Lyon joue t-elle dans l'évolution de votre projet ?
Nous n'avons pas encore de clients car nous sommes encore au stade de développement. Par contre, nous travaillons en partenariat avec l'Ecole Centrale Lyon qui nous fournit un bureau et une salle de manip. Elle nous a également octroyé une bourse de 10.000€ pour améliorer la technologie.
Parallèlement nous sommes incubés chez 1Kubator qui nous dispense une formation intensive de création d'entreprise. Nous avons récemment rencontré Eric Larrey, directeur de Verdi Ingénierie Rhône Alpes et ancien centralien de Lyon. Il nous a fait part de son intérêt pour le projet et nous a proposé de travailler ensemble si nous arrivons à développer la technologie.
Quels sont vos priorités actuelles et comment peut-on vous aider ?
Nous avons besoin du réseau ! Nous cherchons à rencontrer des industriels qui ont des enjeux de traitement de l'eau mais aussi des responsables de station d'épuration pour confronter nos idées à leurs problèmes réels . Ainsi nous pourrons concevoir la technologie pour répondre au mieux à leurs modes de fonctionnement. Les financements sont également bienvenus afin d'accompagner notre développement. La phase de lancement est toujours délicate et sans argent, le projet pourrait malheureusement être ralenti voire même s'arrêter.
Plus d'info sur le site lichen-ecology.com
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