Liste des articles
Vue 284 fois
02 octobre 2023

Lucas Pollonghini (ECL 2000) : Ingénieur en chef adjoint sur les trains d’atterrissage A320 chez Safran Landing Systems

Lucas Pollonghini (ECL 2000) travaille à la Direction Technique de la division train d’atterrissage de Safran Landing Systems, où il occupe le poste d’ingénieur en chef adjoint, soit chef de projet technique en charge de la flotte de train d’atterrissage A320. Il a accepté pour Technica de survoler son parcours et de détailler ses missions actuelles.


Bonjour Lucas. Vous êtes aujourd'hui Ingénieur en chef adjoint A320 Main Landing Gear. Pouvez-vous nous décrire votre poste et vos responsabilités ?

Je fais partie d’une équipe pluridisciplinaire (appelé IPT pour Integrated Program Team) réunissant différentes fonctions du programme A320 au sein de Safran Landing Systems : le programme, la production, les achats, le support client, la qualité et l'ingénierie. Je suis la voix de l’ingénierie dans l’IPT et la voix de l’IPT à la direction technique. Mon rôle tient en plusieurs points :

  • le support aux évènements en service qui arrivent sur les avions. A Safran Landing Systems, nous avons un front office (le support client) qui fait l’interface avec les compagnies aériennes mais quand un problème plus important arrive et nécessite une analyse, un avis technique, le support client fait appel à nous et c’est là que j’interviens en faisant travailler selon les cas des spécialistes design, calcul ou autres.
  • la responsabilité de la navigabilité des trains d’atterrissage, c’est à dire d’autoriser (ou non) un train d’atterrissage de continuer à voler en fonction de ce qu’il a vécu. Lors d’un évènement en service, un train peut avoir subi des dommages ne permettant plus son utilisation. C’est à nous qu’il revient de prendre la décision
  • le support à la production des trains d’atterrissage. L’objectif ici est de permettre de résoudre les problèmes arrivant lors de la fabrication des trains comme des changements de définition pour permettre plus de flexibilité (ex : permettre d’utiliser une autre matière, supprimer des procédés de fabrication nocifs pour l’environnement et régit par le règlement européen REACh...)
  • assurer l’interface technique avec notre client Airbus qui se trouve en Angleterre à Filton près de Bristol.

Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Une des priorités consiste à aider la production dans la crise matière qu’on rencontre depuis 2 ans. Suite au Covid, la chaîne d’approvisionnement a été assez désorganisée au point de se retrouver avec d’importantes pénuries de matières. Mon rôle consiste avec mes équipes à identifier et autoriser une autre matière qui soit plus facilement « approvisionnable » que celle actuellement utilisée. Cela nécessite d’interagir avec les achats de matières d’un côté, et de l’autre, avec le département Matériaux et Procédés ainsi que le Bureau d’Étude. Je suis chargé de coordonner l’ensemble de ces actions.

Un autre projet sur lequel je travaille est la qualification d’une nouvelle pièce du train principal A320 qu’on appelle le palier inférieur (ou lower bearing) au niveau de l’interface entre le piston de l’amortisseur et le caisson. L’objectif de ce projet a été de développer un nouveau palier avec un nouveau revêtement limitant les échauffements en service. Ce projet en cours depuis 2016 a nécessité de définir et développer ce nouveau palier avec un sous-traitant, de le qualifier par des essais qu’on a réalisé sur notre site anglais et de le faire approuver par Airbus. Un travail de longue haleine qui est en passe d’aboutir avec une évaluation  en condition réelle du nouveau palier sur un certain nombre d’avions pour valider le comportement en service.

Quels sont les complexités techniques les plus importantes que vous devez gérer ?

Parfois, un évènement en service arrive sur un train d’atterrissage (une pièce casse par exemple). Nous devons alors envoyer le train d’atterrissage en expertise à notre laboratoire d’analyse. L’objectif est de déterminer les causes de cet évènement et surtout de devoir définir qu’il n’y a pas de risques pour d’autres trains d’atterrissage actuellement en service. C’est un peu comme la police scientifique si je peux me permettre le parallèle. Le laboratoire va analyser la ou les pièces et nous aider à déterminer la cause racine afin de savoir si on doit agir sur la navigabilité d’autres trains en service. Récemment, par exemple, nous avons eu une pièce de train d’atterrissage qui s’est fracturée à l’atterrissage sans dommage pour l’avion ou les passagers. L’inspection de la pièce a révélé qu’elle avait cassé en rupture fatigue suite à une mauvaise intervention survenue lors d’une maintenance périodique (faite tous les 10 ans). Une autre pièce (vérin) en interface avait été mal réglée (trop longue) et à chaque atterrissage, le vérin mettait en tension la pièce. Au bout de quelques milliers de vols, la pièce a fini par céder. Cette conclusion a été faite suite à l’investigation et un groupe de travail réunissant les principaux métiers chez nous mais aussi avec Airbus.

Si vous deviez ne retenir qu'un seul projet, celui dont vous êtes le plus fier, lequel choisiriez-vous ? Et pourquoi ? Qu'avez-vous appris de cette expérience ?

Entre 2015 et 2018, je travaillais sur le développement d’un nouvel inverseur de poussée pour un avion d’affaire à Safran Nacelles et nous avons certifié cet inverseur, dans un contexte de partenariat avec une entreprise américaine, pour un client américain et un avionneur canadien. Même si la nacelle n’était pas révolutionnaire, nous n’étions pas nombreux, nous avons rencontré des problèmes importants en essai et il a fallu relever ce défi avec une relativement petite équipe (environ 10 personnes). C’était aussi pour moi un défi personnel car je venais de changer de société du groupe Safran, je ne connaissais pas le produit (inverseur de poussée) ni le métier de chef de projet.

Qu'est-ce qui vous intéresse et vous motive dans votre métier?

La diversité des sujets à traiter. Le fait de se lever le matin en se disant qu’on va faire telle ou telle chose et de devoir tout changer car un évènement en service est arrivé et nécessite d’être traité en priorité

Comment voyez-vous évoluer votre métier ?

Le domaine de l'aéronautique évolue très rapidement et s'internationalise de plus en plus. Les projets en partenariat avec des personnes provenant de sociétés/ pays différents vont se multiplier, nécessitant des chefs de projet pour faire travailler des groupes de personnes d’horizons très différents. Ce phénomène va selon moi s’accentuer dans les prochaines années.

En un peu plus de 20 ans vous êtes passé par 4 sociétés du groupe Safran. Avec un peu de recul, y voyez-vous une certaine logique ?

Mon premier poste était sur un projet militaire français chez SAGEM (devenu Safran Electronique and Defence). Techniquement intéressant, il me manquait une dimension internationale ce qui’ m’avait motivé pour partir faire un double diplôme aux USA. J’ai donc profité de la fusion Sagem/ Snecma de 2005 pour aller travailler sur un projet européen : le moteur de l’avion A400M. J’ai été amené à travailler avec des allemands et des espagnols.

En 2015, j’avais fait un peu le tour de ce que je faisais dans la Division Essais de Safran Aircraft Engines (ex Snecma) et je voulais me rapprocher de mon domicile, j’ai donc trouvé un poste de chef de projet technique à Safran Nacelles. J’ai beaucoup aimé ce que je faisais mais en 2021, la charge de travail et les opportunités étaient moins importantes, j’ai donc décidé de prendre les devants et d’aller chez Safran Landing Systems aussi pour travailler avec Airbus, que je ne connaissais pas.

Je ne regrette pas ces changements qui ont enrichi mon expérience professionnelle et je suis reconnaissant qu’un groupe comme Safran m'ait permis d'évoluer ainsi.

QUESTIONS POUR UN ALUMNI DE CENTRALE LYON

- Le ou La prof de l'ECL qui vous a marqué ?

Pas de prof spécifiquement mais une matière : en arrivant à l’ECL, la première semaine, on nous a fait faire un séminaire de communication. Après des années de sciences dures, cela fut un grand changement et un premier contact avec les sciences humaines. Je m’en souviens encore maintenant 25 ans plus tard.

 

- La matière à Centrale que vous préfériez ?

Pas vraiment de grande préférence mais plutôt la mécanique des fluides. Ce qui m’a amené à partir faire un double diplôme en Aerospace Engineering aux USA

 

- Celle que vous aimiez le moins ?

Le cours de mathématiques, trop théorique pour moi.

 

- L'activité que vous avez préférée pratiquer en dehors des cours ?

Le volley-ball que je pratiquais le lundi soir et le jeudi après midi en compétition UNSS. Une équipe soudée, une bonne ambiance...

 

- L'adjectif (ou une courte phrase) pour qualifier votre parcours à l'ECL ?

En y ajoutant mon double diplôme, je dirais la « diversité » qui m’a poussé à partir découvrir un autre pays et une autre culture. Centrale Lyon y a grandement contribué.

Auteur

Diplômé de l'ECL (promo 2000) et d’un master à Penn State University aux USA en 2001, Lucas débute sa carrière comme ingénieur d’étude pour un missile Air Sol chez Sagem. En 2006, il devient Ingénieur d’essai à Snecma, en 2009, chef de projet Lean (Black Belt) sur des projets d’amélioration de la direction technique et enfin en 2011, manager à la Division Essai. En 2015, Il est muté chez Aircelle où il occupe le poste d'Ingénieur en chef sur un inverseur de poussée puis une Nacelle en 2018. Depuis 2021, Lucas est ingénieur en chef adjoint sur les trains d’atterrissage A320.

A lire

Commentaires

Aucun commentaire

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire. Connectez-vous.