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06 mai 2022

Rencontre avec Gilles Garnier (ECL 1993) - VP Operations de Saint Gobain Sekurit

Gilles Garnier est VP au sein du COMEX de Saint Gobain Sekurit, un poste stratégique dans un secteur de la transformation du verre qui connaît depuis plusieurs années de nombreuses et profondes transformations tant technologiques, qu’environnementales. Performances thermiques optimisées, poids minimal, vitrage équipés de systèmes de sécurité, d’opacification et d'éclairage intégrés à la matrice verrière, Gilles Garnier fait le point sur les innovations qui font avancer son entreprise ainsi que le rôle des ingénieurs dans ces évolutions en cours.


Bonjour Monsieur Garnier. Comment décririez-vous votre rôle de VP Operations chez Saint-Gobain Sekurit ?

Saint Gobain Sekurit est au sein du groupe l'activité de transformation du verre plat à destination des marchés de la mobilité : voitures particulières (équipement original et remplacement via Sekurit Service plus connu en France sous le nom de France Pare-Brise), moyens de transport collectifs et industriels et nouvelles mobilités (robotaxi, navettes autonomes, etc….). Nous sommes un des leaders mondiaux sur ce secteur avec un chiffre d'affaires d'environ 2,5 mi€ et nous employons plus de 15 000 personnes au sein d'une quarantaine d'entités reparties dans le monde.

Mon rôle de VP Operations au sein du COMEX de Saint Gobain Sekurit est de définir et de déployer la stratégie opérationnelle qui couvre les aspects EHS, Développement durable, Transformation Digitale, Performance Industrielle, Investissements, Supply Chain (Logistique et Achats).

Quels sont les principaux projets sur lesquels vous travaillez actuellement ?

Le monde de la mobilité est dans une phase de transformation profonde qui se caractérise par l'électrification rapide et l'arrivée de nouveaux acteurs avec des modèles économiques et des stratégies différents et le besoin de systèmes vitrés de plus en plus complexes.

Nous mettons en œuvre cette transition complète de nos outils opérationnels avec quatre ambitions majeures :

  • Transformation de nos usines et formation de nos équipes pour accueillir la production de systèmes complexes tout en adaptant notre implantation industrielle avec la montée en puissance de l'Asie et de NAFTA dans la mobilité électrique,
  • Transformation digitale de l'ensemble de nos opérations (zéro papier, supply chain 100% connectée, traçabilité unitaire, collecte et partage de données opérationnelles),
  • Réduction de notre impact environnemental visant la résilience de notre modèle industriel,
  • Responsabilisation de nos équipes avec une plus grande internationalisation de notre expertise et une diversité renforcée.

Où se situe la complexité technique et la part d'innovation dans l'activité de  Saint-Gobain Sekurit ?

Historiquement, la complexité était principalement centrée sur la transformation du verre via des process internes permettant de fournir des produits avec des géométries de plus en plus complexes, des performances thermiques optimisées et un poids minimal.

Nous ajoutons maintenant une complexité "système" étant donné que nos vitrages sont souvent équipés avec des systèmes de sécurité (caméras aujourd'hui, LIDAR demain), des systèmes d'opacification et d'éclairage intégrés à la matrice verrière.

En plus des vitrages passifs, nous développons des surfaces vitrées actives qui nécessitent d'intégrer de nouveaux métiers (intégrateurs électroniques, etc….) tout en minimisant l'impact de nos opérations sur l'environnement (ingénieurs thermiciens, ecodesigners, etc….)

Il y a 20 ans, l'ingénieur emblématique de notre activité était celui qui à côté de son four de bombage savait mettre en forme un pare-brise avec la forme la plus précise et optiquement parfait. Dans 10 ans, ce sera plutôt le codeur qui saura programmer la séquence d'illumination d'un toit panoramique vitré….

Que vous apporte votre formation d'ingénieur dans votre rôle de VP Operations ?

Ma formation d'ingénieur m'apporte la structuration dans l'analyse des problèmes, que ce soit un problème de réduction d'empreinte CO2, la décision du meilleur investissement pour une nouvelle usine en Chine mais aussi l'animation et la responsabilisation d'équipes multiculturelles dans l'optimisation de notre supply-chain.

Par ailleurs, la formation généraliste de Centrale Lyon permet un bon équilibre entre l'expertise et le pragmatisme que je résume souvent par "faire preuve de bon sens".

Quand avez-vous pour la dernière fois fait appel à vos connaissances d'ingénieur ?

J'y fais appel de moins en moins. Néanmoins, avec notre ambition très forte de réduire notre impact carbone sur nos opérations, nous avons recours à de nouvelles technologies et récemment, je me suis replongé dans mes cours de thermodynamique pour comprendre un futur investissement de cogénération énergétique dans notre usine en Italie.

Y a-t-il eu d'importantes évolutions techniques/technologiques chez Saint-Gobain Sekurit depuis que vous y travaillez ?

Le monde automobile est depuis toujours un monde en mouvement. Depuis 5 ans, tout s'accélère notamment avec l'arrivée de nouveaux acteurs comme Tesla, Lucid, CHJ, Hopium qui bousculent les constructeurs historiques mais aussi les fournisseurs de ces constructeurs.

Temps de développement réduit, mise en place d'innovations directement à grande échelle, remise en cause de choix technologiques, approche digitale différente, nous apprenons vite et nous nous adaptons. C'est aussi une opportunité pour changer nos modes de travail qui étaient souvent calqués sur ceux de nos clients historiques. Là aussi une transition passionnante.

Quelles sont les grandes tendances des évolutions à venir pour Saint-Gobain Sekurit ? Comment les problématiques environnementales impactent-elles par exemple l'activité ?

Comme indiqué précédemment, nous devenons un fournisseur de systèmes et de solutions incluant un vitrage alors qu'auparavant nous étions un fournisseur de "matériau transparent". C'est un vrai changement d'état d'esprit et nous avons mis en place de nombreux groupes de travail dans toutes nos Operations pour former nos équipes à ces changements.

En ce qui concerne notre ambition environnementale, cela a toujours été dans notre ADN de verrier. Le verre est un matériau recyclable à l'infini. C'est pour cela que nous menons une démarche extrêmement ambitieuse de transition vers des Opérations à impact minimal sur l'environnement (plus de la moitié de nos sites industriels valorisent 100% de leurs déchets et nous visons le ZERO déchet non valorisé à l'horizon 2025, nous migrons rapidement vers une énergie électrique 100% verte ou à basse intensité carbone, nous réduisons fortement notre consommation d'eau pour éviter tout stress hydrique autour de nos usines, etc…).

Et beaucoup d'autres initiatives sont en cours de lancement pour aller plus loin surtout via le partenariat avec nos fournisseurs et nos clients pour développer une démarche circulaire de plus en plus vertueuse.

Vous avez vécu et travaillé 4 ans au Brésil. Racontez-nous cette expérience ? Que vous a-t-elle apporté ?

Effectivement, plus de 4 ans dans notre usine de Sao Paulo au Brésil. C'est avant tout une expérience personnelle et familiale exceptionnelle dans un pays fabuleux avec une chaleur humaine assez unique dans le monde.

Professionnellement, ce fut une étape décisive pour moi. De par la formation d'ingénieur et dans un contexte industriel français très technique, on a souvent tendance à vouloir répondre aux problématiques quotidiennes essentiellement via le raisonnement technique, l'approche scientifique. Au Brésil, j'ai compris que 90% des solutions se trouvent dans l'humain et l'animation des équipes au quotidien. Dans un contexte moins automatisé qu’en France, la sécurité, la qualité, la performance, la résilience industrielle se créent sur le terrain avec les équipes et très peu avec des outils scientifiques issus des formations académiques.

En tant que dirigeant, vous êtes, on l'imagine, amené à prendre des décisions importantes. Pouvez-vous nous raconter un choix que vous avez fait et sur lequel vous avez longtemps hésité ?

La mutation de notre modèle industriel sur le long terme est perturbée fortement depuis 3 ans par les crises conjoncturelles du secteur automobile (COVID-19, crise des semi-conducteurs et maintenant crise ukrainienne). Cela conduit à revoir constamment ses choix. Au début de la crise du COVID, j'ai longtemps hésité à poursuivre la croissance de nos investissements technologiques mexicains et NAFTA (Mexique/USA) vu la complexité à former les équipes sur place dans un contexte de confinement mondial généralisé. Au final, nous avons gardé notre ambition et grâce aux outils digitaux mis en place nous avons surmonté ces difficultés. La bonne décision qui nous permet aujourd’hui d'accompagner nos clients et de renforcer notre position sur ces marchés d'avenir.

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Gilles Garnier est VP au sein du COMEX de Saint Gobain Sekurit, un poste stratégique dans un secteur de la transformation du verre qui connaît depuis plusieurs années de nombreuses et profondes transformations tant technologiques, qu’environnementales.

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